Le style qui nous intéresse ici est le « Yaoï ». Il s’agit d’une de ces bandes dessinées faisant partie d’un marché de niche très populaire là-bas. Sa particularité est que ses protagonistes y sont homosexuels (ou se découvrent gay) et vivent des romances dignes des « Feux de l’amour ». Pourtant, au Japon, les auteurs et lecteurs de ces œuvres ne sont pas des hommes… mais bien des femmes !
Le stéréotype de la femme soumise
Pour savoir comment ce mouvement est né, il faut remonter un peu dans le temps. A l’époque où les mangas « romantiques » inondent les librairies, la représentation des femmes est toujours la même : les héroïnes de bandes dessinées ont toutes des mensurations parfaites et sont surtout très soumises face aux hommes, voir complètement nunuches (l’image de la femme traditionnelle japonaise a la dent dure).
Las de ces clichés, les femmes se désintéressent de la bande dessinée et les ventes de mangas connaissent une petite crise économique… que le Yaoï viendra bizarrement combler !
Beaucoup trop clichés
Pour remettre les choses dans leur contexte, imaginez qu’en France les lycéennes des années 80 se prennent d’adoration pour de la bande dessinée homosexuelle masculine. Improbable ? Une histoire de culture on vous dit… Le plus étrange est que les homosexuels japonais, qui sont pourtant la première cible marketing de ces mangas, ne les lisent pas du tout. La raison est toute simple : les hommes représentés dans les Yaoï ne sont pas assez masculins, pas assez musclés, pas assez poilus, bref… beaucoup trop clichés ! Les gays se tournent alors plutôt vers le style de manga dit « Bara » beaucoup plus sexuel, viril et moins fleur bleue (écrit par des hommes pour les hommes).
En ce qui concerne les histoires d’amour entre femmes (on parlera ici de manga « Yuri »), elles sont bien souvent écrites par des hommes à destination d’un public… masculin ! Vous suivez toujours ?
Quand la bande dessinée devient un exutoire de la domination masculine
A travers le Yaoï, c’est toute une communauté d’auteures japonaises qui vont alors percer dans le métier en introduisant pour la toute première fois l’identité de genre et la sexualité dans de la bande dessinée destinée aux femmes. C’est une véritable révolution pour ce pays longtemps sujet à sa politique conservatrice et isolationniste. La limite entre le masculin et le féminin est, selon les œuvres, parfois à peine perceptible.
Le Yaoï en France ?
En France, la traduction et l’importation ont commencé doucement dans les années 90. Ce secteur représente aujourd’hui entre 1% et 2% du marché du manga dans l’hexagone avec une clientèle extrêmement fidèle. C’est d’ailleurs la force du Yaoï d’avoir une base de fans irréductibles, au grand bonheur des éditeurs spécialisés.
Contrairement au Japon, les lecteurs de ce type de bande dessinée sont aussi bien des hommes que des femmes.
Pour en savoir plus…
Si vous êtes curieux, sachez qu’il existe même un salon et des conventions dédiés a cette culture (le Y/CON à Paris et le Y/MEN à Lyon pour ne citer qu’eux).
Ces événements populaires proposent de nombreuses animations (concours de cosplay, conférences avec les auteurs, etc…). Ils permettent aux fans de se rencontrer et d’échanger sur le sujet.
Bonus video
Mx Cordélia nous présente une série de mangas Yaoï, Dou Kyu Sei et Sotsu Gyo Sei de Asumiko Nakamura : une romance entre garçons, au lycée, avec de très très beaux dessins…