En Normandie, certaines églises ne se contentent plus de rites d’un autre âge : elles affichent, distribuent et amplifient des messages homophobes et transphobes. Derrière l’encens et les vitraux, un réseau organisé de figures catholiques ultra-conservatrices s’active pour diffuser des discours anti-LGBT+, anti-genre et anti-IVG. Une offensive idéologique que le diocèse de Rouen tolère… et parfois encourage.

À Saint-Martin-de-Boscherville, près de Rouen, l’abbaye dirigée par l’abbé Henri Delavenne ne se contente pas de messes tournées vers l’autel : elle diffuse aussi des tracts aux relents homophobes, anti-IVG et anti-PMA qui « créent des dangers d’inceste ».
Relations homosexuelles nocives
Selon le média d’investigation normand, proche de Médiapart, Le Poulpe, des brochures à l’entrée du lieu de culte affirment par exemple que « de telles unions [homosexuelles] sont nocives pour le bon développement de la société » et appellent l’État à « contenir le phénomène ». Selon Le Poulpe, d’autres prospectus distribués dans l’Abbaye normande assurent que « l’avortement est un délit abominable » et rejettent tous les moyens contraceptifs considérés comme « illicites ».

Cette rhétorique rappelle celle de la Manif pour tous (devenue Syndicat de la Famille) et s’accompagne d’une vision rétrograde du genre et de la famille. En novembre dernier, le diocèse a ainsi invité René Écochard, médecin lyonnais connu pour avoir décrit la transidentité comme une « épidémie contagieuse » (Mediapart en 2024), à tenir une conférence sur le genre. L’événement, accueilli par l’Institut catholique de Paris (ICF) à Rouen, a déclenché une manifestation syndicale, certains militants dénonçant la présence de membres d’un groupuscule identitaire dans le service d’ordre.
Messages culpabilisants
Le réseau catholique « Louis et Zélie« , promu par l’Abbaye de Saint-Martin de Boscherville, véhicule également des messages culpabilisants envers les personnes LGBT et promeut une vision pathologisante de l’homosexualité, allant jusqu’à parler de « guérison ». Ce réseau est soutenu par des figures religieuses proches de l’extrême droite, comme Mgr Rey et Mgr Rougé, ainsi que par Guillaume d’Alançon, acteur majeur des milieux catholiques traditionalistes.

Au-delà des prises de position sur l’avortement, Le Poulpe pointe la tolérance — voire la proximité — du diocèse de Rouen avec des courants religieux qui s’opposent frontalement aux droits des personnes LGBT et aux avancées en matière d’égalité. Dans un département où l’archevêque Dominique Lebrun s’est déjà illustré par des propos hostiles à l’IVG et des amitiés avec la Fraternité Saint-Pie-X, cette orientation interroge sur l’espace laissé aux discours inclusifs dans l’Église normande.
Pour aller plus loin
L’Enquête complète du Poulpe par Justine Grollier : « Le diocèse de Rouen adoube les franges les plus tradis des catholiques normands », 3 juin 2025 : sur le site normand du Poulpe ou sur le site de Médiapart (accès abonnés).