Gayviking : Racontez-nous l’histoire de cette association…
Sois fier·e et ose : Dans notre parcours, nous sommes déjà actifs dans les associations étudiantes à l’Esigelec mais aussi dans d’autres structures rouennaises comme Sangrancune76 qui lutte contre la précarité menstruelle.
Nous avons commencé avec un petit groupe de trois personnes. On voulait parler des tabous autour de la sexualité féminine mais également masculine. À l’Esigelec, il y a 80% d’hommes, cela influence les comportements et les discours.
Une association par et pour les étudiant·es
Au fil de nos discussions nous évoquions de nombreuses thématiques et notamment la lutte contre les discriminations comme les LGBTphobies.
Au début, nous n’avions réalisé qu’une page facebook. Mais pour légitimer notre groupe et nos actions, nous devions passer par la création d’une association. Avec cette association, nous pensons que c’est aux étudiants de traiter de ces thématiques et pas seulement l’administration.
La création de Sois Fier.e Et Ose est un signe fort à l’Esigelec. On est là, on existe. Créer cette association pourra aussi permettre de récolter des subventions afin de développer nos projets et acheter des supports.
L’association au sein de l’Esigelec lutte contre toutes les discriminations : contre le sexisme, les LGBTphobies et le racisme car il y a aussi beaucoup d’étudiants étrangers à l’école.
Un milieu encore très masculin
Gayviking : Pourquoi évoquer les questions LGBT à l’Esigelec ?
Sois fier·e et ose : Le monde scientifique et notamment celui des ingénieurs est un milieu très masculin. Les thématiques LGBT sont rarement prises en compte tant pour les filles que pour les garçons. Beaucoup n’ont pas conscience de ces problématiques. C’est pourquoi, il est important de sensibiliser les étudiants, car les personnes LGBT n’osent pas s’exprimer.
Avec notre association, nous pensons que ça peut faire du bien. Ces personnes, verront qu’il y a une représentation LGBT à l’école. Ils sont légitimes à être là.
Gayviking : Concrètement, quelles sont les actions envisagées ?
Sois fier·e et ose : Nous voulons sensibiliser tous les étudiants qu’ils soient LGBT ou non. Et pour les personnes LGBT, si elles ont besoin de nous, nous sommes là. Les personnes peuvent nous rencontrer dans un environnement safe. Nous répondons présent.
Concrètement, nous souhaiterions faire des podcast, récolter des témoignages, parler de la transphobie par exemple avec des personnes transgenres, les concernées. Ces podcast fonctionneront comme des discussions, entre amis. Nous voulons ouvrir les esprits, sans que cela soit triste ou lourd.
Garantir un environnement safe
Nous souhaitons également que les étudiants s’approprient la thématique LGBT afin de s’informer. L’association proposera des recommandations de livres, de podscast, de séries… Les gens pourront comprendre le monde, seul ou à plusieurs sans être jugé.
Notre but n’est pas de faire de la politique. Nous laissons cela à d’autres associations qui le font très bien. Notre objectif est d’occuper tranquillement le terrain en étant efficace sur les thématiques LGBT, diffuser les connaissances, accueillir les personnes dans un environnement safe, sans jugement.
Gayviking : Collaborez-vous avec d’autres grandes écoles ?
Sois fier·e et ose : Cette année, le distanciel freine un peu les choses mais cela ne nous empêchera pas de proposer des actions avec des associations d’autres écoles comme HeForShe de Neoma pour l’égalité homme/femme. HeForShe fait un travail remarquable et souhaite s’ouvrir aux thématiques LGBT.
Nous avons des projets avec d’autres associations notamment sur le racisme, l’égalité entre les sexes ou la grossophie. Dans tous les cas, si des membres veulent porter une action spécifique sur le thème des lgbtphobies elles peuvent s’adresser à nous, sans problème.
Les grandes écoles rarement sollicitées sur les questions LGBT
Gayviking : Avez-vous pris contact avec les associations LGBT existantes ?
Sois fier·e et ose : Aujourd’hui, nous sommes déjà en contact des associations LGBT de la région. Nous avons organisé la semaine dernière un évènement avec l’association Fiertés Colorées en visio-conférence pour les étudiants. Nous sommes en contact avec le BDE Yellow CESI, Le Refuge, et HeForShe Neoma BS Rouen.
C’est important de cibler l’enseignement supérieur. Dès que l’on est étudiant, on est lâché dans la nature. Les grandes écoles sont rarement sollicitées pour des interventions de sensibilisations aux questions LGBT, contrairement aux collèges et lycées.
Gayviking : Tous les étudiants peuvent adhérer ?
Sois fier·e et ose : Tout le monde est le bienvenue. Il n’y a d’adhésion payante pour notre association. Il y a déjà plusieurs personnes LGBT dans l’association, ce que l’on ne retrouverait pas forcément dans les autres associations. Elles sont totalement acceptées. Nous avons un bon retour.
En parallèle, des élèves déjà diplômées de l’Esigelec nous ont contactées. Des personnes LGBT nous disent qu’elles auraient bien aimé avoir eu ce type d’association à l’Esigelec. Cela nous fait plaisir. Nous pensons être utile.
La peur du rejet de leurs camarades
Gayviking : Trouvez-vous qu’il existe un sentiment homophobe sur le campus ?
Sois fier·e et ose : Il est difficile de répondre à cette question. En tout cas, parfois, il peut y avoir un malaise. Sur le Campus, nous travaillons avec deux femmes de l’administration à l’Esigelec. Ceux sont des personnes géniales : Annick Fouquet responsable Relations Elèves et Marie Libbrecht-Godier, Service Relations Elèves. Elles font un travail magnifique. Nous parlons beaucoup avec elles. Elles voient ce qui se passe à l’Esigelec car elles sont au contact des étudiants.
Elles nous disent que des étudiants LGBT ont des difficultés à s’assumer, qui n’osent pas en parler. Certains ont peur du rejet de leurs camarades. Bien entendu, il y a les insultes classiques « pd, pédale.. ». Les étudiants disent cela sans forcément se rendre compte de la portée homophobe. En tout cas, nous n’avons pas eu connaissance d’agression physique homophobe.
Toutefois, nous pensons que la situation s’améliore d’année en année. Dans l’histoire de l’Esigelec, une ancienne association spécifiquement LGBT était vanné systématiquement. Aujourd’hui, c’est différent, cela a changé… mais l’homophobie classique bête et méchante demeure.
Gayviking : un dernier mot à ajouter ?
Sois fier·e et ose : On espère que l’on va faire bouger les lignes parmi les étudiants ingénieurs de l’Esigelec. On est là, on existe. Dans beaucoup d’écoles d’ingénieurs, les stéréotypes règnent en maître. Cela nous semble important de sensibiliser les étudiants aux questions LGBT. Le monde scientifique et des ingénieurs ne sont pas des milieux suffisamment ouverts et documentés sur la question. Il faut ouvrir les esprits.
Contacts association Sois Fier.e Et Ose