La semaine dernière, le tribunal correctionnel de Rouen a condamné un homme de 36 ans pour violence contre un couple de femmes. Cette violente agression illustre les dangers persistants de l’homophobie et la difficulté d’apporter la preuve de tels actes.
Le 16 décembre 2024, un homme de 36 ans a comparu devant le tribunal de Rouen pour avoir agressé une femme en avril 2023 à Sotteville-lès-Rouen, dans la banlieue de Rouen. Dans une chronique judiciaire, le journal 76actu indique que l’agression, d’une violence extrême, a eu lieu alors que la victime, Marie, promenait son chien avec sa compagne, Lucie. L’agresseur, Laurent, les a abordées et une altercation a éclaté, entraînant des coups violents contre Marie, qui a subi de graves blessures (21 jours d’ITT, interruption temporaire de travail).
Le bénéfice du doute
Lors de l’audience, des témoins ont évoqué des insultes homophobes proférées par Laurent. La procureure a souligné la confusion dans les propos de Laurent et son passé de condamnations pour violences. La cour a reconnu Laurent coupable des violences physiques et l’a condamné à huit mois de prison avec bracelet électronique, mais l’a relaxé pour les insultes homophobes « au bénéfice du doute ».
Cette affaire met en lumière la violence et la discrimination que peuvent subir les couples homosexuels, même dans des situations banales comme une promenade avec un chien. Les deux femmes ont dû déménager suite à cet incident.
Cette affaire illustre aussi la persistance de la violence envers les personnes LGBT+ dans l’espace public, un phénomène en hausse de 13% en 2023 selon les statistiques officielles.
Elle souligne également la difficulté de prouver le caractère homophobe des agressions, malgré les témoignages des victimes et du témoin. Comme le souligne 76actu : « Dans le dossier, un seul témoin indique se souvenir d’insultes en raison de l’orientation sexuelle des deux femmes, mais il n’est pas capable de restituer les propos exacts de Laurent. »
La difficulté de la preuve certaine
Les avocats des accusés d’insultes homophobes ont bien compris les enjeux de la loi contre les propos LGBTphobes. En contestant l’accusation d’homophobie, l’avocat cherche à réduire la gravité perçue des actes de son client et à préserver ses chances d’obtenir une peine plus clémente. En effet, les peines sont fortement aggravées quand les agressions sont accompagnées d’insultes homophobes ou transphobes.
Dans cette affaire à Sotteville-lès-Rouen, on pourra noter l’empressement de l’accusé à contester ses propos homophobes. À l’audience, sur les conseils de son avocat, il dira : « Je reconnais les violences, mais pas les insultes ».
Le rôle de l’avocat est de remettre en question la preuve des propos homophobes et de mettre en doute l’interprétation des victimes. Il s’agit de contester les témoignages ou leur fiabilité, en soulignant leur caractère indirect ou imprécis. Par exemple, argumenter que les témoins n’ont pas entendu clairement les propos ou qu’ils ne peuvent en restituer exactement les termes.
C’est la clef des procès pour insultes homophobes. En droit pénal français, la preuve doit être certaine. Une absence de preuves tangibles affaiblit l’accusation d’homophobie, ce qui peut conduire à la relaxe pour cette circonstance aggravante. En l’espèce c’était le cas.
Certes, le rôle de l’avocat, et de la justice, est de veiller au respect du principe fondamental de la présomption d’innocence. Mais, au même titre que les non-lieu prononcés dans les affaires d’agression sexuelle ou de viol, ces situations répétées sont particulièrement frustrantes et décourageantes pour les personnes LGBT+.
(les prénoms ont été modifiés)