(article publié le 04/12/2011)
En octobre dernier, le Président du Conseil Général de l’Essonne, Jérôme Guedj, a invité l’ensemble des Présidents des Départements à signer une charte d’engagement en faveur de l’homoparentalité et contre les discriminations en matière d’adoption. En France, les départements sont chargés d’instruire et de délivrer les agréments à l’adoption.
Les présidents des 5 départements normands ont reçu cet appel. Parmi eux, le Président du Département de la Seine-Maritime, Didier Marie, a répondu favorablement à l’appel. Dans un courrier adressé aux associations LGBT de la région dont l’association Gaynormandie, il a précisé qu’il était favorable depuis longtemps à ce que « les orientations sexuelles ne soient plus un frein à l’adoption, pas plus qu’au mariage d’ailleurs ». Après avoir questionné les cinq départements normands, hormis la Seine-Maritime, Gaynormandie n’a pas reçu, à ce jour, les réponses des autres départements sur leur éventuel engagement ou non à la charte d’engagement en faveur de l’homoparentalité.
L’ADOPTION EN FRANCE
Il faut savoir que la législation Française est très ambiguë sur l’homoparentalité. En effet, la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle dans l’instruction des demandes d’adoption est interdite. La France a déjà été condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme comme le rappelle Jérôme Guedj dans sa charte.
En France, un célibataire homo ou hétéro peut théoriquement adopter mais des discriminations apparaissent souvent dans le traitements des dossiers suivant les départements.
Pour qu’un couple de gays ou de lesbiennes puisse adopter il faut qu’ils soient marié(e)s, or en France le mariage gay n’est pas autorisé. De facto, un couple homo ne peut adopter. C’est aussi une des raisons des opposants au mariage gay en France. Mariage = ouverture des droits à l’adoption pour les couples homosexuels. Aussi, si un couple d’hommes ou de femmes souhaite adopter, l’un des partenaires devra s’effacer afin que la demande d’agrément à l’adoption ait une chance d’aboutir au bénéfice d’un seul partenaire. L’enfant adopté ne pourra être que l’enfant d’un seul membre du couple. L’autre partenaire n’aura aucun droit ou devoir sur l’enfant adopté. C’est ce rejet qui est aujourd’hui combattu par les associations de défense LGBT.
C’est aussi là le paradoxe de la loi française, un célibataire gay peut légalement adopter mais pas un couple gay !!
L’ENGAGEMENT DU DEPARTEMENT – DELIVRANCE D’AGREMENTS AUX COUPLES GAYS
Signer une telle charte est donc un acte militant pour les Président(e)s des Départements car la charte précise que le signataire s’engage à instruire les demandes d’agrément sans discrimination fondée sur l’orientation sexuelle des demandeurs et quel que soit le cadre familial dans lesquels ils évoluent.
C’est dans ce cadre que le Président du Département de la Seine-Maritime, Didier Marie, a répondu aux questions de Gaynormandie :
Gaynormandie : Pourquoi cette action en faveur de l’homoparentalité ?
Didier Marie : Mon engagement politique est lié depuis toujours au combat pour l’égalité des droits et la lutte contre les discriminations. Sur ce sujet comme sur beaucoup d’autres, je m’élève contre ce qui divise nos concitoyens, contre ce qui exacerbe les différences et discrimine. C’est donc naturellement que j’ai rejoins la proposition de mon collègue Jérôme Guedj, président du Conseil Général de l’Essonne, tout comme j’étais signataire de la compagne « Ensemble contre l’homophobie ».
Gaynormandie : Vous êtes donc prêt à délivrer un agrément à une personne vivant ouvertement son homosexualité en tant que couple ?
Didier Marie : Tout à fait, ce que les agents du Départements doivent prendre en compte est avant tout l’intérêt de l’enfant. Et rien ne s’y oppose, comme dans n’importe quelle famille. Ce qui importe par-dessus tout est le projet parental, quelle que soit l’orientation sexuelle du demandeur ou du couple. J’ai demandé aux agents du Département que cette question ne soit en aucun cas discriminante même si vous comprendrez qu’à l’inverse un couple homosexuel ne bénéficiera pas d’une étude « allégée » de sa demande. Il devra répondre aux mêmes critères d’accueil de l’enfant et de projet parental. Concernant la question plus précise de l’adoption internationale, je ne suis a priori pas favorable à omettre cette information des dossiers d’agrément. Je reste toutefois ouvert à un débat sur ce point.
Gaynormandie : Comment réagisse les agents du Département à votre position ? Allez-vous faire des actions des sensibilisation ?
Didier Marie : Avant de rendre publique ma position, j’ai souhaité m’assurer auprès des services du Département que nos pratiques administratives n’étaient pas en contradictions avec les valeurs politiques que je porte. Cet échange m’a confirmé l’excellence du travail accompli et l’exigence d’égalité de traitement mise en œuvre dans l’étude des dossiers. Concernant les actions de sensibilisation, j’ai souhaité que la direction de la citoyenneté retienne, en 2012, parmi ses thèmes principaux, la question de l’homophobie. Rien n’empêche dans ce cadre, en lien avec les associations, de travailler avec les agents du Département et les professionnels de l’enfance à la question de l’homoparentalité.
A quand la réponse des autres départements pour aller vers la même voie ?!
Pour aller plus loin…
Voir la charte en faveur de l’homoparentalité et la lutte contre les discriminations en matière d’adoption (cliquez ici)
Voir le courrier de Jérôme Guedj envoyé aux 100 départements français leur demandant de signer la charte (cliquez ici)
Voir le site institutionnel du Département de le Seine-Maritime (cliquez ici)
rappel : Gaynormandie est un site web média LGBT régional et à ses côtés existe une structure associative indépendante du même nom : Gaynormandie
crédits photos : Seb*Aka : couple photo et Département de la Seine-Maritime : photo Didier Marie