Caen : tabassés car supposés homosexuels, la justice condamne partiellement

Le journal Ouest-France nous apprend que trois jeunes ont été condamnés par le tribunal de Caen après avoir tabassés deux hommes qu’ils estimaient homosexuels.

La scène se déroule dans la nuit du 3 au 4 octobre dernier sur le Cours Koenig à Caen (hippodrome), non loin du parking et de la route de Louvigny, réputés pour être un lieu de drague gay. Ce n’est pas la première fois que des agressions se déroulent dans cette zone comme nous le rappelions en août 2020.

Violence à St Chamond
(photo : Hakobyan GettyImages Canva)

Tabassés et insultés

Cette nuit là, les trois agresseurs semblent imbibés d’alcool. Ils croisent deux hommes, la cinquantaine et les insultent : « Avoue que tu es PD ». Mais les deux promeneurs répondent ne pas être gay. Cela n’a pas semblé plaire aux trois jeunes qui tabassent les deux cinquantenaires à coups de poings et avec une branche d’arbre. Les agresseurs repartent après leur avoir volé leurs téléphones.

Les victimes réussissent à prévenir la police grâce à un passant. Mais les agresseurs reviennent en voiture et les insultent de nouveau de « sales PD ».

Arrêtés et condamnés

Ils sont finalement arrêtés par les forces de l’ordre. Le procureur propose une comparution immédiate le lendemain, le 5 octobre. Les trois agresseurs sont condamnés : Kevin (22 ans) et Frédéric (34 ans) récoltent 12 mois de prison (dont 6 avec sursis). Le troisième, Jason (23 ans), est condamné à 6 mois fermes. Les trois agresseurs seront prochainement convoqués devant le juge d’application des peines afin de statuer sur une incarcération ou un éventuel aménagement de peine.

Justice et homophobie, police
(photo Pixabay)

Absence de circonstance aggravante

Dans cette affaire, la circonstance aggravante pour discrimination homophobe n’a pas été retenue dans ce vol avec agression. Pourtant le code pénal prévoit clairement cette situation dans son article 132-77. Il y a une circonstance aggravante lorsque le délit est précédé ou accompagné de propos à l’encontre de la victime en raison de son orientation sexuelle ou son identité de genre vraie ou supposée.

Même si les deux victimes ne sont pas homosexuelles, les agresseurs ont supposé que les deux hommes l’étaient. Le déroulé de cette affaire le démontre. L’agression est réellement centrée sur cette homophobie.

Questionnement…

Cette absence de circonstance aggravante étonne. Hypothèse : nous pouvons supposer que pour faire passer la pilule d’une comparution immédiate, et dans une « bonne administration » de la justice, le procureur ait dû abandonner les circonstances aggravantes pour homophobie.

Le but aurait été de faire accepter aux accusés cette procédure rapide de jugement. En effet, dans une comparution immédiate, il faut l’accord des accusés. Cela permet d’éviter un long procès (économe en procédure) et bénéficier, potentiellement, de peines moins lourdes, même si cela ne se démontre pas à chaque fois.

Dans cette affaire la justice est rapide mais elle s’éloigne de la volonté du législateur. Elle ne va pas dans le sens de la lutte contre les discriminations LGBTphobes.

De leur côté, les deux victimes sont naturellement choquées. Après avoir été tabassés, l’un d’entre eux a eu le tympan perforé avec 7 jours d’ITT* pour l’un et 4 jours pour l’autre.

 

*ITTP (incapacité totale de travail personnel). Différent de l’arrêt de travail, l’ITT permet de qualifier la gravité d’une agression et donc le tribunal compétent et les peines encourues contre les agresseurs (à partir de 8 jours ITT, la peine encourue est de trois ans). La victime doit se rendre à l’hôpital pour se soigner et établir une attestation médicale pour coups et blessures.

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