Après cinq années de présidence et de projets aboutis, Florence Dodeman, co-fondatrice de l’association, a décidé de laisser son fauteuil de « Première Dame » à une jeune militante de 31 ans, Élise Poulain.
« Défendre les autres à mon détriment. »
Gayviking : Élise… qui êtes-vous… ?
Élise Poulain :Je m’appelle Élise, j’ai 31 ans, je suis infirmière. Adolescente j’ai été discriminée pour mon physique, trop grande, trop mince, trop grosse, binoclarde et autre sobriquets. J’ai toujours aimé m’occuper de mon prochain, toujours à défendre les autres à mon détriment. Aujourd’hui, je suis dans une démarche similaire mais j’apprends à me préserver…
L’association Gay’T Normande a six ans d’existence, tu es la deuxième présidente de son histoire. Qu’est-ce-qui t’a décidé à prendre de ces responsabilités ?
Il y a un an, j’étais à mille lieues d’imaginer que j’aurais ce statut aujourd’hui. Mais après de nombreuses discussions avec Florence, son souhait de se retirer de la présidence, pour des questions de santé, sans pour autant quitter l’association, j’ai ressenti la crainte que l’association soit en stand-by et qu’on ne puisse plus continuer les actions en cours et développer de nouveaux projets, alors j’ai décidé avec son appui et toute sa confiance de reprendre la présidence.
Gay’T Normande est la première association dans laquelle je m’investis, j’y suis depuis 2011. J’ai été accueillie à bras ouverts, j’ai rencontré des personnes formidables, qui sont devenues des amies.
Je suis toute neuve dans la direction d’une association, je tâcherai d’y faire honneur. Je suis bien entourée par un Conseil d’Administration que j’ai choisi. Nous sommes tous différents, mais c’est ça qui fait la force d’une société. J’apprends au quotidien. Mon principal cheval de bataille est l’acceptation de son prochain.
Nos militants ont des profils différents
A l’heure actuelle nous sommes une cinquantaine, et nous n’en sommes qu’au mois de février ! Beaucoup de ré-adhésions mais aussi de nouvelles demandes. Gay’T Normande est une association où les membres sont tous différent(e)s, avec des objectifs différents. Certain(e)s plus militant(e)s tandis que d’autres vont plutôt être sur un pan éducatif et d’autres conviviaux. Nous sommes éclectiques, c’est ce qui fait la force de l’association. Nous sommes toujours présents à chaque fois qu’un événement se présente, en faveur ou en défaveur des droits LGBT.
Après avoir quitté le Centre LGBT de Normandie, vous avez réduit votre activité au territoire de la métropole Rouennaise et non plus à toute la Normandie alors que c’était dans les gênes de sa création, pourquoi ?
Je n’étais pas dans le Conseil d’Administration lorsque Gay’T Normande a quitté le Centre LGBT, mais à l’époque, quand l’ancien Conseil d’Administration nous a apporté les raisons, j’ai compris. Le centre LGBT a pour but de rassembler les associations et leur actions sur toute la Normandie, mais, de notre avis, l’éloignement géographique ne permet pas cette interaction (ndlr : le siège du Centre LGBT étant à Caen). Je ne compte pas pour le moment revenir sur cette décision. Nous verrons à l’avenir si le CLGBT s’étend sur tout le territoire.
Il y a beaucoup d’associations en Normandie, ayant chacune une zone d’intervention, notre association a un rayonnement qui s’étend à la métropole rouennaise, elle va même parfois s’aventurer sur les terres euroises, dans le cadre de convivialités ou interventions en milieu scolaire. Nous sommes tous des bénévoles, nous préférons être efficaces sur la métropole plutôt que de faire un peu partout mais de manière superficielle.
Pérenniser nos nombreuses actions sur le terrain
Pour les prochains mois, nous sommes en période de recrutement de nouveaux bénévoles souhaitant faire des interventions en milieu scolaire, notamment s’étendre dans les campagnes où notre travail serait important, nous avons la permanence d’accueil tous les 3ème samedi du mois, nous renforçons les convivialités qui était une force il y a quelques années, nous continuons notre festival Ciné Friendly (les 16-17-18 juin 2017) ainsi que les événements cinémas durant l’année (d’ailleurs le 1er Avril, une soirée Priscilla Folle du Désert aura lieu à l’Omnia et au Milk). Nous sommes en train de développer un groupe de travail pour aider les personnes trans-identitaires. Pour les prochaines années, je préfère me laisser du temps avant d’y répondre car il est important de pérenniser nos nombreuses actions sur le terrain. Il faut que je prenne mes marques, mais d’ores et déjà, j’ai commencé à travailler avec mon équipe.
Depuis quelques temps, la question transgenre est devenue une question importante au sein de l’association. Y’a-t ‘il un défaut de prise en charge de ce public au niveau local ? Comment comptez-vous faire évoluer la situation ?
Je ne sais pas s’il y a un défaut, mais il y a une forte demande ! Nous sommes une association LGBT, les LGB s’identifient aisément mais pour les personnes transgenres, il est plus difficile pour elles de trouver leur place. C’est pour cela que ce groupe de travail me tient à cœur. Je dirais même nous tient à cœur, avec Florence, vice-présidente, qui met de l’âme à l’ouvrage et n’avait pas eu la possibilité jusque là de mener le projet à son terme. Nous reviendrons dans quelques mois avec de nouvelles avancées. Je n’en dis pas plus car nous sommes au tout début de ce projet, mais il aidera beaucoup de personnes, j’en suis convaincue.
Au niveau des relations avec les élus locaux, comment se passent vos rapports ? Êtes-vous écoutés, soutenus ?
Je n’ai pas encore l’occasion de les rencontrer en tant que présidente. Mais l’association entretient des relations cordiales avec eux.
En tant qu’observateurs de la vie locale, quels retours avez-vous sur la vie des personnes LGBT sur Rouen et sa région ?
Malheureusement il y a encore beaucoup de travail à faire, l’homophobie est omniprésente, dans toutes les institutions, toutes les familles. Fort heureusement, nous sommes dans un pays libre où nous pouvons militer pour avancer. Avec Thomas, militant à Gay’T Normande, nous sommes allés faire un échange avec des lycéens, en campagne, lors d’une projection cinématographique. Une jeune fille nous a interpellé sur la nécessité de notre association, que nous devons aller dans son établissement pour faire de l’éducation, autant pour les élèves que pour certains membres de l’équipe pédagogique. Ce qui prouve que nous avons encore du pain sur la planche ! Si l’homophobie n’existait plus, Gay’T Normande serait uniquement conviviale.
Pour aller plus loin…
Lien : site internet de Gay’T Normande (lien externe)
Lien : page Facebook de l’association Gay’T Normande (lien externe)
(photos fournies par Élise)